Ulysse et la reine des Amazones (fantaisie)

Lorsque la reine Penthésilée se fut immolée, comme le raconte Heinrich von Kleist, les Amazones ne surent que faire du cadavre mutilé d’Achille qu’elles avaient rassemblé et placé dans un coffre. Certaines imputaient au héros grec la mort de leur reine et clamaient qu’on aurait dû le laisser sur place, que les chiens et les oiseaux le finissent, d’autres au contraire arguant de l’amour surhumain qui avait uni la reine et le héros, souhaitaient associer celui-ci au culte de la reine. C’est sur ces entrefaites, tandis que les deux partis s’opposaient devant la nouvelle reine, la jeune Myrina, qu’Ulysse se présenta avec les insignes de négociateur pour demander à la reine de bien vouloir rendre aux Achéens les restes d’Achille afin qu’ils lui fissent des obsèques dignes de sa valeur. La reine décida vite d’accéder à cette requête qui la tirait d’embarras (en vérité, en privant les unes de leur profanation, les autres de leur vénération, elle ne satisfit personne mais au moins mit-elle fin aux disputes, aux plaidoiries, aux harangues et aux récriminations qui avaient accablé sa cour depuis le lendemain de son élection) et à faire bon accueil à Ulysse.

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Ovide (fantaisie)

Sous couvert de célébration de la gens Iulia, la famille de l’Empereur qui, comme chacun sait, prétendait par le fils d’Enée descendre de Vénus Aphrodite elle-même, le poète aurait dissimulé dans son livre une théologie érotique hétérodoxe dont la figure principale était la déesse de l’amour ou selon d’autres une trinité qui associait à la déesse son fils, Cupidon, et le dieu père, Zeus, dieu invisible et sans forme propre, qui ne se manifestait que par les avatars où il s’incarnait pour imprégner des mortelles. Je n’ai jamais compris la méthode par laquelle on pouvait extraire du texte des Métamorphoses une telle théologie, laquelle se serait doublée d’une théurgie, théurgie qui aurait été la raison du bannissement du poète, mais il y aurait eu une version parallèle du livre, apparemment inoffensive puisqu’elle aurait consisté uniquement en une suite de descriptions de lieux ouvrant chacun sur une histoire tirée du livre du poète. Ce livre se serait donné comme un abrégé des Métamorphoses mais en donnerait une clé d’interprétation si l’on le confrontait à l’œuvre originelle en portant attention à l’ordre de présentation des récits mythologiques, qui n’y serait pas chronologique comme dans le livre originel mais suivrait une autre logique, censément celle de l’édifice théologique, et aux modifications plus ou moins discrètes que subissaient lesdits récits.